La nudité de l'esprit.

La nudité de l'esprit.

Le vingt-quatrième cavaler, les samouraïs et Kirn la jument 13 /44

Nous étions en seize cent quinze, le soleil brûlait nos peaux, le jour chauffait nos kimonos.

 

L'étoile est notre amie mais ce matin là, elle scintillait en filigrane … Elle ne nous aidait pas. Car je regardais devant moi et ce que voyais ne me plaisait pas. Les cavaliers Bushis étaient là, brutes et rudes,  bêtes en rut d’un face à face, dans notre univers de raffinement extrême, leurs Cinquante mille montures étaient parfaitement alignées, prêtes à charger. Les chevaux se cambraient comme les geishas se prêtaient au jeu de l'amour. Comme des geishas au chant d’espoir, le visage enflammée de la partition du verbe aimer, elles jubilaient, la croupe frémissante, la sueur du plaisir graissant leurs sabots.  Mais eux vomissaient la colère des guerriers. Les armures brillaient, elles allaient devenir fières au combat, fièvre de combat. Alors d'un cri, d'un élan, cinquante mille chevaux et cinquante mille cavaliers s'élançaient. Et le soleil de face aveuglait mes troupes et montrait en reflet de miroir leurs armures. Carapace de force et de haine. Arcs courts et violents, tueurs de samouraïs. Épées à double tranchant, faiseuses de veuves. Les bêtes s'ébrouaient, les galops soulevaient des tonnes de boues sous les sabots. Les lames tournoyaient déjà vers le ciel et le vent sifflait dans les fourreaux, comme si le diable voulait en sortir, comme si le bon dieu n’était que prière de sucre et le démon sel de vie.

 

J'étais Oda, japonais, samouraïs, Shogun d'une troupe de cent-mille hommes et le vingt-quatrième cavalier des quarante-quatre justiciers et chevaliers de l'Honneur. Ma jument âgée de quatre ans s'appelait Kirn. Blanche de robe et de belle croupe, elle obéissait à la voix. Elle m'insufflait par sa force de la confiance, de la puissance en mes combats et une volonté de bousculer le destin. Kirn, ma jument n'était pas seulement réveillée de la conscience du drame qui allait bousculer nos vies mais voulait que sur son dos je reste le maître de la bataille. Kirn ma fidèle compagne était puissante, encourageante et aimante. Kirn, alors se cabrait, il était donné ordre aux cent milles samouraïs de charger vers nos ennemis. Et je priais les forces de la terre, l'eau et le feu de me donner la victoire ou mourir dans l'honneur. Et les deux armées se rejoignaient. Le bruit de la charge devenait enfer, tous les hommes gueulaient leur envie de vivre et de tuer. Je sortais mon Katana, grand sabre qui pouvait trancher trois têtes à la fois. Je défourrais le Shoto, sabre court, fidèle en combat rapproché. Et les fers s'entrechoquaient en étincelles brillantes et les corps tombaient par centaine. Et Les chevaux se frottaient, panse contre panse. Ma jument Kirn n'avait plus que la robe du sang. A la fin de la journée, lorsque l'astre allait de l'autre coté du monde, il n 'y avait plus un cavalier bushis debout. Le règne des samouraïs pouvait continuer. J'étais le vingt-quatrième cavalier, des quarante-quatre de l'Honneur.

 

Ma jument Kirn n'était pas blessée. Pensée contre pensée, de ses lèvres tendres elle mangeait la pomme offerte dans le creux de mes mains. La jolie danse d’une demoiselle aux reins cambrés, je l’imaginais danseuses de cabaret, à ses pieds toute une cavalerie, une escadrille de serpents charmés et dormeurs. 



28/11/2012
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