Lettre à mon père.
Je suis à genoux devant le ventre de la terre. Je veux revenir en arrière, être une constellation sur les larmes de ma mère. Si mon âme s’étreint un soir entre le rouge et le noir, n’appelle pas l’armée du salut, ne bip pas le SAMU, va réciter ailleurs ton je vous salue … Le désespoir ne laisse jamais choire c’est un feu bicolore, tu passes du rouge au vert sans amende, sans coup de sifflet.
Il ne crie jamais au loup,
il ne dit jamais nous,
c’est juste un coup de grisou
qui caresse ta joue.
Ouvrir un testament c’est écrire une nouvelle d’une nouvelle frontière. Tu me testes amant de mes veines, tu dors du sommeil des justes toi mon père. Tu me fais souvent un signe de la main, un geste attendri mais dans ton écrin de vie, tu veux m’enfermer vaurien ! Ton geste de la main n’est rien qu’un mépris de vie. Tu me pourlèches les gênes, moi ton ange affaibli …
Tu m’as légué des sens mais tu as omis de joindre dans ton coffret surprise, la notice. Malappris, mal appris j’en vomis !
Sous ton joug de mauvais coucheur, tu me fais devenir mauvais penseur, mauvaise accoucheuse, ta pensée trop souvent m’obsède et je ne fais qu’écrire des saloperies !
Maxime d’un poète affranchi à présent je t’oublie !
Pars une seconde fois, te souviens-tu ? Tu t’es si bien enfui cela fait exactement quarante neuf années et trois mois de vie sans ton regard, sans tes bras, sans un seul baiser de tes lèvres, justes quelques mots entendus de ma vie fœtale, le timbre de ta voix s’est évanoui dans les eaux de celle qui m’a donnée la vie. Toi tu as choisi une eau plus profonde …
Ce ventre bossué que tu as renié, tu étais trop nombriliste, d’un toucher absent, tes doigts m’ont laissée orpheline, l’adresse du destinataire n’est pas attribuée, l’expéditrice fut offusquée. Je me souviens j’avais indiqué rue du paradis, sur le quai de l’enfer tu t’étais échoué, toutes les prières de ma bouche d’adulte n’ont pu dessertir le diamant funéraire de mon âme d’enfant.
Tu joues si bien à la bataille navale, papa, moi touchée et toi coulé !
48 années + 8 mois de vie + 7 mois fœtaux sans toi, ce n’est rien qu’une vie avec moi.
Je poursuis mon petit bout de chemin, ton grand axe routier n’est qu’un accès factice.
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